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RDC : à Lubero, on se prépare au pire en pensant à l'avenir

7 février 2025

Malgré la menace d'affrontements entre l'armée congolaise et le M23 dans le territoire de Lubero, les habitants prennent soin de leurs champs pour avoir de quoi manger demain.

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Rues de Lubero dans le Nord-Kivu
Dans l'est de la RDC, après la chute de Goma, le M23 renforce ses positions sur le front sud du territoire de Lubero. Image : Philemon Barbier/AFP/Getty Images

À Lubero, la majorité de la population vit de l'agriculture. Alors que la menace des M23 pèse sur la localité, des agriculteurs continuent de se rendre dans leurs champs. Malgré la peur, ils profitent ainsi de l'accalmie qui règne encore dans le chef-lieu de la province du Nord-Kivu, où toutes les activités fonctionnent encore normalement.

Depuis le début de la semaine, Cendrine Masika sème des haricots sur ses terres, non loin de la ville. Elle tente ainsi de prévenir la carence de haricots sur le marché dans les prochains jours.

"Oui, j'ai peur de ce qui peut nous arriver, mais je ne saurais fuir sans semer les haricots. Il y a souvent beaucoup de famine ici, à Lubero. Voilà pourquoi je profite de cette saison culturale. Si les combats se rapprochent de nous et nous obligent à fuir, nous reviendrons peut-être quand ces haricots seront prêts à récolter. J'ai un seul champ, je ne peux pas l'abandonner comme ça !".

"Si je ne travaille pas aujourd'hui, ce sont mes enfants qui vont mourir de faim"

Semer pour demain

De nombreux habitants de Lubero sont conscients que la situation peut se dégrader à tout moment, car la dernière position rebelle est située à seulement 54 kilomètres au sud de Lubero-centre.

Mais Jeannine Soki ne veut pas céder à la psychose. Au contraire, elle s'occupe, elle aussi, de ses champs : "Moi je n'ai pas peur et j'ai décidé de ne pas me fier aux rumeurs et aux fausses informations qui circulent dans la cité sur l'avancée des rebelles. Si je ne travaille pas aujourd'hui, ce sont mes enfants qui vont mourir de faim dans les mois à venir", assure-t-elle

"Je demande aussi aux autres de travailler, de ne pas avoir peur. Ne soyons pas emportés par cette guerre, elle n'est pas notre guerre, elle peut même finir là-bas. Si nous ratons cette saison culturale pour semer le haricot, c'est nous-mêmes qui allons en souffrir".

Espoirs dans l'armée

Pour sa part, la société civile de Lubero espère que l'armée pourra stopper l'avancée du M23 vers Lubero, Butembo et Beni, trois villes du Nord-Kivu encore sous contrôle de l'armée congolaise.

"Nous avons été alertés sur le fait que les rebelles se sont renforcés à Alimbongo et Mambasa, après qu'ils ont pris Goma", dit Mumbere Ndaghala.

Ce membre de la société civile compte ainsi sur les FARDC et leurs alliés, les milices wazalendo. "Il faut à tout prix les repousser, constituer un mur solide pour éviter des morts et de nouveaux déplacements des populations. Certains retournés ont repris l'exil. Voilà pourquoi nous demandons à l'armée et aux patriotes wazalendo, de stopper cette avancée de l'ennemi".

L'armée congolaise et les wazalendo sont parvenus à repousser à plusieurs reprises le M23 au sud de Lubero. Mais, depuis fin 2024, cette rébellion a gagné du terrain jusqu'à se rapprocher de Lubero-centre.

Dans un communiqué du 31 janvier 2025, l'armée ougandaise, déployée dans l'est de la RDC, a annoncé adopter une posture défensive avancée dans sa zone d'opération, évoquant une aggravation de la situation sécuritaire dans le Nord-Kivu.

Depuis, sa présence a été renforcée dans le territoire de Lubero, alimentant ainsi les peurs des habitants qui se méfient de ce déploiement militaire étranger. Le gouvernement congolais a justifié cette présence des militaires ougandais par la poursuite des opérations militaires conjointes entre les deux armées.