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La terreur sanglante des rebelles ADF dans le Lubero

Pascal Mapenzi
25 juin 2025

Les miliciens des Forces démocratiques alliées auraient tué plus d'un millier de personnes depuis un an dans le territoire de Lubero dans l'est de la RDC.

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Un soldat congolais sur une moto dans la ville de Lubero
Les forces armées congolaises et ougandaises ne parviennent pas à enrayer les tueriesImage : Philemon Barbier/AFP/Getty Images

Dans l'est de la RDC, les miliciens des Forces démocratiques alliées, les ADF, sont accusés d'avoir massacré au moins mille personnes dans le secteur de Bapere, en territoire de Lubero, depuis juin 2024.

Ces statistiques ont été dévoilées récemment par les autorités locales et la société civile, soit une année après que la rébellion islamiste d'origine ougandaise a étendu ses attaques dans ce territoire.

C'est autour de la localité de Mangurejipa, une zone riche à minerai que les tueries se sont accentuées. Les armées congolaise et ougandaise ont déployé leurs forces armées dans la région pour combattre la rébellion.

Des dizaines de milliers de déplacés

Mais des milliers d'habitants ayant fui ces violences vivent dans une grande précarité dans leurs lieux de refuge. Et c'est à Butembo, une ville du Nord-Kivu près de Beni, que ces déplacés ont trouvé refuge.

La coordination humanitaire de la ville parle d'au moins 53.000 déplacés internes qui vivent dispersés dans la ville, la plupart, dans des familles d'accueil.

Aucun camp de déplacés n'a été construit pour les accueillir.

Ecoutez le reportage à Beni...

Tasiviwe Kavira a quitté Mangurejipa il y a deux semaines et s'est installée, avec ses dix enfants, dans un quartier périphérique de Butembo.

"Pour manger, il faut aller auprès des personnes de bonne volonté pour demander de l'aide, explique-t-elle. Je fais du porte- à porte dans des quartiers et dans des boutiques en ville pour subvenir aux besoins de ma famille. Si on ne donne pas, on ne mange pas non plus ce jour-là. Et comme il n'y a pas des camps des déplacées ici, j'ai réussi à réunir un petit montant avec les dons que je quémande par ci, par là et c'est comment ça que j'ai pris une chambrette en location, mais je ne sais pas si je saurai renouveler le loyer le mois prochain".

A Beni, la résistance s'organise contre le M23

L'impuissance des forces armées 

C'est en juin 2024 que les ADF ont attaqué pour la première fois le territoire de Lubero. Ils ont ensuite gagné du terrain et tué au moins mille personnes en une année.

La rébellion opérait jusque-là dans la région de Beni au Nord-Kivu et en province de l'Ituri, deux provinces de l'est du pays sous état de siège depuis mai 2021. Suite à ces attaques, l'armée ougandaise a renforcé sa présence à Lubero, dans le cadre des opérations conjointes avec l'armée congolaise.

Mais Samuel Kagheni de la société civile du secteur de Bapere s'inquiète que toutes ces mesures n'aient pas su ramener la paix.

Selon lui, "l'état de siège a prouvé ses limites dans la gestion de la crise sécuritaire et nous avons compris que la coalition UPDF (armée ougandaise) et FARDC (armée congolaise) a aussi pris la question à la légère. Donc, si ces offensives avaient commencé dès le début, prendre la question avec beaucoup des précautions, on ne devrait pas arriver au-delà de mille personnes massacrées".

Une vue sur les collines du Lubero
Le territoire de Lubero se trouve dans la province du Nord-KivuImage : Philemon Barbier/AFP/Getty Images

Des structures sanitaires et des écoles fermées

Kahindo Taheramboko a perdu des membres de ses familles tués au cours de ces attaques. Elle s'est réfugiée, elle aussi, à Butembo. Elle a tout perdu à cause de ces attaques rebelles.

"Au village on cultivait beaucoup, on avait des champs de riz, de l'arachide, de cacao, de palmier en huile, raconte-t-elle. On était heureux et ça me fait de la peine aujourd'hui lorsque je pense à notre vie au village. Regarde, j'ai 12 enfants, ils dorment sur une bâche, sans couverture ! Quand ils me demandent à manger, je ne sais pas quoi leur donner. Par chance je peux trouver une botte d'amarantes et malheureusement je manque d'huile et du sel ! Vraiment je ne sais plus comment gérer ces enfants ! Aussi, nous partageons une seule pièce comme dortoir : les parents, mêlés aux enfants filles et garçons, tous dans une petite chambre".

Des écoles et des structures sanitaires ont dû fermer leurs portes à cause de l'insécurité. La protection des civils qui sont restés sur place et ceux qui ont fui ces violences armées reste un immense défi.