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Pression djihadiste sur le bois et le carburant au Niger

Reliou Koubakin | Avec agences
12 mai 2025

Les djihadistes perturbent l’approvisionnement en bois de la capitale, en interdisant son commerce. Niamey éprouve des difficultés croissantes à se ravitailler.

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Image tiré du film DER WALDMACHER de Volker Schlöndorff En 1981, l'Australien Tony Rinaudo, jeune agronome, arrive au Niger pour lutter contre l'avancée croissante du désert et la misère de la population (2020-2021)
Conséquence de la perturbation du trafic de bois : les prix flambent Image : Michael Kern

A Niamey au Niger, la vente du bois à destination des ménages pourrait être de plus en plus compliquée. Avec donc des difficultés croissantes dans le ravitaillement pour les deux millions d’habitants de la capitale.  90% des ménages utilisent le bois pour la cuisine ou l'éclairage, selon les services des Eaux et Forêts. En plus des repas quotidiens, le bois est utilisé notamment le jour de la fête musulmane de l'Aïd al-Adha où plus de 54.000 tonnes de bois sont utilisés - soit près du quart de la consommation annuelle de Niamey.   

Les dernières forêts de ce pays sahélien en grande partie désertique, sont situées à moins de 100 km de Niamey. Mais, l'armée doit y faire face aux menaces terroristes.  

Selon des sources locales, les djihadistes qui se contentaient de réguler la coupe du bois en percevant des taxes, interdisent désormais sa coupe dans leur zone d'influence.  

Issoufou Souleymane est vendeur de bois confirme qu’"avant, il ne nous fallait qu'une journée pour ramener un chargement de bois à Niamey. Aujourd'hui, cela peut prendre jusqu'à une semaine, vous comprenez, jusqu'à une semaine, alors la situation est insupportable".  

Les forêts, zone de repli pour les djihadistes   

Selon le Laboratoire d'études et de recherches sur les dynamiques sociales et le développement Local (Lasdel), les forêts qui longent le Burkina Faso et qui étaient "une zone de repli traditionnelle pour les groupes de bandits" le sont maintenant pour "les groupes djihadistes".  

Le ministre de l'Intérieur du Niger (2016), Mohamed Bazoum, se recueille sur la tombe des 22 soldats tués par des militants islamistes alors qu'ils surveillaient un camp de réfugiés dans la région de Tahoua.
Depuis juillet 2023, date du coup d'Etat, au moins 2.400 personnes ont été tuées au Niger, selon l'ONG Acled Image : Boureima Hama/Getty Images

Mamane Seydou, secrétaire général de l’Association nationale des exploitants du bois du Niger (ANEB - Niger) explique ainsi que "les zones d'exploitation du bois sont des zones très boisées où parfois ce sont des caches même des terroristes"

"Maintenant eux, les terroristes, ils disent que les commerçants-transporteurs du bois, les exploitants du bois sont en train de détruire leurs cases. Donc, eux, ils ont dit ça c'est inadmissible, ils ne peuvent pas accepter ça, à maintes fois ils nous ont donné vraiment des avertissements." 

Mamane Seydou explique que depuis 2015, son association a perdu 24 personnes, des chauffeurs et des apprentis. 52 de leurs camions ont été brûlés.

Contrôle du trafic de carburant  

De leur côté, les autorités nigériennes veulent mieux contrôler le trafic de carburant à Niamey.  

60% de l'essence et du gasoil utilisés par les terroristes viennent des stations-services de Niamey, a récemment déclaré le gouverneur de la région, le général de brigade Assoumane Abdou Harouna devant les promoteurs des stations-services. Ceux-ci ont été sommés de placer des caméras de surveillance au niveau de leurs stations-services.

L'acteur de la société civile Sahanin Mahamadou précise que les groupes terroristes se ravitaillent aussi auprès des forces de défense et de sécurité sur le front. Il salue tout de même la décision du gouverneur de Niamey.   

Le fait que les stations-services mettent les caméras de surveillance permettra non seulement à ces gérants de stations de savoir ce que leur personnel fait. Mais cela permettrait aussi à nos forces de défense et de sécurité d’être rassurées qu’il n’y a pas des gens qui vendent le carburant de notre pays à ces terroristes.”   

Inondations à Niamey
Les stations-services sont dans le collimateur des autorités nigériennes Image : Mahamadou Abdoulkarim/DW

 Autre secteur où les groupes terroristes se ravitaillent, c’est celui des armes. Dans un rapport publié fin avril, l’organisation britannique Conflict Armament Research (CAR) indiquait que les groupes djihadistes sont aussi alimentés en armes saisies lors des raids contre les forces armées du Sahel.  

Sur 726 armes saisies entre 2014 et 2023, sur 5.890 armes répertoriées par les enquêteurs, environ 20% proviennent directement des stocks des armées nationales sahéliennes. Un chiffre probablement sous-estimé, selon l’un des co-auteurs du rapport.