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Le Niger se retire de la Force multinationale mixte

Eric Topona | Avec agences
31 mars 2025

La junte militaire au pouvoir a annoncé le week-end dernier sa décision de se retirer de cette force antidjihadiste pour renforcer la sécurisation des sites pétroliers du nord du pays.

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Un convoi de militaires nigériens circulant en 2016 dans la ville de Bosso dans le cadre de la lutte contre le djihadisme
Les troupes nigériennes changent d'objectif et se concentreront sur la sécurité des sites pétroliersImage : Issouf Sanogo/AFP/Getty Images

La Force multinationale mixte (FMM) a été créée en 1994 dans le but de lutter contre les groupes djihadistes de la région. Elle est composée du Niger, du Tchad, du Cameroun, du Nigeriaet du Béninet a été réactivée en 2015. En 2022, elle comptait environ 10.000 soldats issus des cinq pays de la région.

Officiellement, les autorités militaires nigériennes ont justifié ce retrait par le souci de renforcer la sécurisation des sites pétroliers du pays.

Une habitation brûlé par les éléments de Boko Haram près de Maiduguri au Nigeria  en juillet 2019(archives)
Voilà plus de vingt ans que Boko Haram sévit dans la région, notamment au NigériaImage : Audu Ali Marte/AFP/Getty Images

En effet, les installations pétrolières situées dans la région de Diffa (sud-est) sont régulièrement menacées par les groupes djihadistes qui écument la région.

Remadji Hoinathy, chercheur principal ISS Africa pour l'Afrique centrale et le bassin du Tchad, dit ne pas être surpris par cette décision de la junte nigérienne.

"Ça fait déjà un moment que le Niger a ralenti sa participation à la Force multinationale mixte. C'est bien dommage, parce que même si le Niger a d'autres priorités sécuritaires, notamment la sécurisation des pipelines, Boko Haram reste une menace qui, de toutes les façons, est toujours en place. La réponse devrait demeurer régionale pour être efficace" affirme-il à la DW.

Mutualisation des forces en péril

Vincent Foucher, chercheur au Centre national de la recherche scientifique (CNRS) en France et spécialiste du groupe djihadiste Boko Haram, ajoute que la participation du Niger à cette force a été ralentie, pour ne pas dire suspendue, depuis le coup d'État qui a renversé, le 26 juillet 2023, le président Mohamed Bazoum.

Des soldats de l'armée tchadienne se tiennent à côté d'un Land Cruiser  à Koundoul (25 km de N'Djaména)
Le Tchad avait failli se retirer de la FMMImage : AFP/Getty Images

Conséquence, estime Remadji Hoinathy, le Niger ne pourra plus partager ou bénéficier de renseignements des autres pays membres de cette initiative.

Vincent Foucher pointe quant à lui d'autres conséquences de ce retrait du Niger.

"Côté nigérien du lac Tchad est une zone qui sert aux deux groupes djihadistes à faire du commerce, à s'approvisionner, à vendre la production agricole des zones qu'ils contrôlent et qui sont très productives. Les deux groupes lèvent leurs impôts, notamment dans la région de Diffa (dans l'est du Niger, ndlr) qu'ils contrôlent", rappelle Vincent Foucher. 

"Avoir un Niger un peu en retrait, avec une collaboration moins forte avec les pays voisins, signifie que les groupes djihadistes du lac Tchad vont être plus à l'aise pour organiser les espèces de proto-États qu'ils gèrent dans la zone depuis plusieurs années".

Fin octobre 2024, après une attaque du groupe djihadiste Boko Haram, le président tchadien, Mahamat Idriss Déby Itno, avait menacé de se retirer ses soldats de cette Force multinationale mixte.

Dans un communiqué publié le 3 novembre 2024, la présidence tchadienne avait dénoncé une "absence de mutualisation des efforts" après l'attaque qui a coûté la vie à une quarantaine de militaires le 27 octobre de la même année dans la région du lac (dans l'ouest du pays).

Depuis l'arrivée au pouvoir d'un régime militaire au Niger à la suite du coup d'état du 26 juillet 2023, les relations entre le Niger et le Nigeria sont tendues. Niamey accuse régulièrement Abuja d'abriter des troupes étrangères pour le déstabiliser. Le Nigeria a toujours démenti ces accusations de son voisin.

DW MA-Bild Eric Topona
Eric Topona Journaliste au programme francophone de la Deutsche WelleETopona