Niger : des "assises nationales" en vase clos
12 février 2025Au Niger, 700 délégués des différentes couches socioprofessionnelles du pays ont été conviés à ces assises qui auront lieu à Niamey du 15 au 19 février. Cependant, la plupart d’entre eux l’ont été sans qu’on leur ait véritablement demandé leur avis.
Le but de cette rencontre est notamment de fixer la durée de la transition ouverte après le renversement du président Mohamed Bazoum le 26 juillet 2023 et ouvrir l’espace politique à plus de liberté. Elle semble aussi présenter une ouverture de façade puisque les partis politiques et les représentants de la diaspora en ont été exclus.
"S’ils n’ont pas été associés dans ce travail, en tout cas, je pense que c’est un véritable manque à gagner. Tout de même, en tant qu’acteurs politiques, nous ne pouvons que souhaiter bonne chance à tous ceux qui ont été conviés à ces assises-là. Qu’ils soient vraiment à la hauteur pour produire des textes devant inspirer l’ensemble des institutions qui seraient mis en place pendant la transition, et même après la transition, pour la gestion des affaires publiques", déplore Kané Kadaouré Habibou, président du parti politique Synergie des démocrates pour la République.
Profil bas
Alors qu’il s’agit de créer les conditions d’une ouverture démocratique, les partis politiques, principaux acteurs pour la conquête du pouvoir, font profil bas, de peur de heurter les militaires au pouvoir.
Abdoulmoumouni Ghousmane, un ancien député du Parti nigérien pour la démocratie et le socialisme (PNDS) de l’ex-parti au pouvoir du président Mohamed Bazoum souligne que "les partis politiques servent à la conquête du pouvoir et je crois que c’est à juste titre qu’ils ne sont pas associés dans les assises préparatoires de toutes les institutions et des textes qui vont être conçus pendant cette transition. Comme on dit, on ne peut pas être juge et partie, donc les partis politiques doivent encore rester un peu en retrait".
De l’avis de certains responsables politiques qui ont préféré garder l’anonymat, ces assises sont un simulacre qui vise à asseoir davantage le pouvoir militaire, afin de créer les conditions pour le maintien du général de brigade Abdourahamane Tiani.
Notons qu'en août 2023, peu après sa prise de pouvoir par un putsch,le général Abdourahamane Tianiavait annoncé l'organisation d'un "dialogue national inclusif" qui devait tracer les "axes prioritaires" de gouvernance et fixer la durée de la transition. Il avait à l'époque mentionné une durée maximale de trois ans, mais n'en avait plus reparlé depuis.
Début 2024, des concertations se sont tenues dans les huit régions du pays, qui devraient servir de base de travail pour les assises de la semaine prochaine.
Une commission nationale a par ailleurs été créée par décret présidentiel pour conduire les travaux des assises. Elle devra remettre son "rapport final" au général Tiani début mars.
Cette commission, dirigée par le Dr Mamoudou Harouna Djingareye, un chef traditionnel, est également composée d'anciens ministres, d'universitaires, de juristes, de militaires, de conseillers du général Tiani, de chefs religieux et de figures de la société civile.
Elle comporte cinq sous-commissions dont les thèmes sont notamment "Paix, sécurité, réconciliation nationale et cohésion sociale", "Refondation politique et institutionnelle" ou "Justice et droits de l'Homme".