Un accord d'expulsion entre l'Allemagne et les talibans ?
4 juillet 2025Le ministre allemand de l'Intérieur, Alexander Dobrindt, aspire à des discussions directes avec les talibans islamistes radicaux en Afghanistan afin d'obtenir plus facilement des expulsions de délinquants d'Allemagne.
"Comme toujours, il faut des tiers pour mener des discussions avec l'Afghanistan. Cela ne doit pas rester une solution permanente", a déclaré le conservateur au magazine Focus. Son objectif est de conclure des accords directs avec les talibans afin de permettre les rapatriements.
Depuis la prise de pouvoir des talibans en 2021, il n'y a plus eu d'expulsions vers l'Afghanistan depuis l'Allemagne - à une exception près : en août dernier, 28 délinquants ont été emmenés à Kaboul avec le soutien du Qatar.
Le gouvernement des talibans est largement mis au ban de la société et les négociations officielles avec eux sont jusqu'à présent inhabituelles.
Au sein de la coalition gouvernementale, la volonté du ministre de l’Intérieur de discuter avec les talibans ne passe pas. Chez les socio-démocrates notamment. La cheffe adjointe du groupe parlementaire du SPD, Sonja Eichwede, y voit un soutien aux talibans pour gagner en légitimité sur le plan international. Elle prévient qu'il ne faudrait pas normaliser les contacts avec les talibans au pouvoir en Afghanistan. Des critiques viennent aussi de l’opposition.
Des critiques de l'Onu
Les Nations unies ont aussi critiqué les projets allemands d'expulsion vers l'Afghanistan. "Il n'est pas approprié de renvoyer des gens en Afghanistan", a déclaré vendredi (04.07.2025) à Genève, la porte-parole du commissaire aux droits de l'Homme des Nations unies, Volker Türk.
"Les conditions sur place ne se prêtent pas encore aux rapatriements", a déclaré Arafat Jamal, le représentant du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) à Kaboul en Afghanistan. "Nous demandons instamment aux pays de ne pas renvoyer de force les Afghans", a-t-il souligné à Génève, en réaction aux déclarations du ministre allemand Alexander Dobrindt.
Les expulsions vers la Syrie restent ouvertes
Selon le ministre de l'Intérieur, les renvois vers la Syrie restent également un défi non résolu. Afin de permettre à nouveau les expulsions vers ce pays, la ministre de l'Intérieur de l'époque, Nancy Faeser du SPD, avait pris contact avec le nouveau gouvernement de transition peu avant son départ. Celui-ci était principalement issu de la milice islamiste HTS, qui avait renversé le dirigeant Bachar el-Assad.
"Des contacts sont en cours avec la Syrie en vue d'un accord sur le rapatriement des délinquants syriens", a déclaré le ministre Alexander Dobrindt. Il n'y a toutefois pas encore de résultats à ce sujet.
Le plafond de 200.000 réfugiés "nettement trop"
Alexander Dobrindt a également demandé une baisse significative du nombre annuel de réfugiés. Le plafond de 200.000 réfugiés par an serait "nettement trop" et dépassé depuis longtemps.
Ce chiffre-plafond avait été évoqué par l'ancien ministre conservateur de l'Intérieur Horst Seehofer. Mais il a été largement dépassé au cours des deux dernières années, avec 600.000 demandeurs d'asile déclarés, auxquels il faut ajouter les 1,2 million d'Ukrainiens, a déclaré l'actuel ministre de l'Intérieur Alexander Dobrindt : "On ne peut donc plus du tout travailler aujourd'hui avec un plafond théorique de 200.000 - ce serait d'ailleurs nettement trop dans la perspective actuelle."
Le ministre de l’Intérieur convie plusieurs de ses collègues à un sommet sur la migration, prévue le 18 juillet. Ceux de la France, de la Pologne, de la République tchèque, du Danemark et de l’Autrice sont notamment invités.