Des victimes de Kisangani toujours sans indemnisations
5 juin 2025De nombreuses victimes de la guerre de six jours à Kisangani, dans le nord-est de la République démocratique du Congo, n'ont jamais été indemnisés et aujourd'hui, 25 ans après, elles ont quasiment perdu tout espoir.
Du 5 au 10 juin 2000, les armées ougandaise et rwandaise se sont affrontées dans les rues de Kisangani, la capitale de la province de la Tshopo. Des combats qui ont fait environ un millier de victimes civiles.
Désormais, le fonds chargé de gérer l'argent pour les victimes est accusé de mauvaise gestion et de possibles détournements ont pu avoir lieu.
Outre les 1000 morts et plus de 3000 blessés, en majorité des civils, les affrontements qui ont ravagé Kisangani ont fait également de très nombreux dégâts matériels, selon les organisations locales de défense des droits humains.
L'Ouganda condamné en 2022 par la CIJ
En 2022, la Cour internationale de justice avait condamné l'Ouganda à payer, à la RDC, 325 millions de dollars en guise de réparation. Kampala a versé jusque-là 160 millions de dollars et certaines des victimes ont pu être indemnisées.
Mais c'est loin d'être le cas pour toutes. Pierre Kibaka a perdu sa maison durant les combats et il n'a jamais obtenu la moindre compensation.
"Je n'ai reçu aucun argent, explique-t-il. La structure qu'on a mise en place, la Frivao, qui gère les fonds d'indemnisation, est tellement politisée que j'ai même mis une croix sur cette histoire. Nous avons demandé au gouvernement qu'on applique réellement le mécanisme de justice transitionnelle."
Le Fonds pour la réparation et l'indemnisation des victimes des activités illicites de l'Ouganda en RDC, le Frivao, gère les fonds versés par l'Ouganda. La structure est rattachée au ministère de la Justice.
D'éventuels détournements d'indemnisations
Mais plusieurs organisations de la société civile critiquent la manière dont ces fonds sont gérés. De possibles détournements pourraient expliquer pourquoi de nombreuses victimes n'ont jamais rien obtenu.
Dismas Kitenge, le président du groupe Lotus, une organisation de défense des droits humains basée à Kisangani, estime que "le côté faible, c'est la réparation qui est faite aujourd'hui par la République démocratique du Congo qui a créé un organisme, le Frivao. Mais la manière dont les réparations se passent (est critiquable)… Il y a beaucoup de fausses victimes qui se sont faufilées aux côtés des vraies victimes. Par ailleurs, c'est tout le monde qui a le même niveau de réparation".
Ce que confirme également Claudine Bela, de la Commission nationale des droits humains. Elle précise que les victimes qui ont eu la chance d'être indemnisées ont toutes reçu la même somme, 2.000 dollars, alors que celles-ci n'ont pas subi les mêmes préjudices.
La DW a essayé d'obtenir la réaction des responsables du Frivao, mais sans succès.