En Ituri, des militaires tirent profit du trafic de minerais
11 juin 2025La province de l'Ituri est riche en ressources minières, notamment de l'or, mais aussi des minéraux dits stratégiques pour la transition écologique, comme l'étain, le tungstène, le tantale ou encore le cobalt.
La société civile locale a plusieurs fois dénoncé l'activisme des groupes armés dans l'est de la RDC et le fait qu'ils étendent et consolident leurs positions dans des zones minières.
Des mineurs taxés
Des critiques similaires sont toutefois portées contre l'armée congolaise. Celle-ci, selon le code minier, n'a pas le droit d'entrer dans les zones minières, elle doit rester dans leur périphérie.
Mais ainsi positionnés, les soldats des FARDC prélèvent des taxes sur les mineurs, sous prétexte d'assurer la sécurité sur le site ou dans ses environs. Certains militaires organisent aussi illégalement du trafic de minerais, souvent de l'or.
Ces faits ont été documentés par les différents rapports des experts des Nations unies.
Rams Malikidogo, cadre de la société civile de Mambasa, chef-lieu de la province de l'Ituri, dénonce le fait que certains militaires s'intéressent plus à leurs activités minières qu'à protéger la population contre les groupes rebelles comme les ADF :
"Il n'est pas rare de trouver des militaires qui sont en train d'exploiter des minerais pendant que d'autres assurent la garde et la protection des Chinois qui travaillent dans les mines. Ils abandonnent pour ainsi dire leur mission principale qui est de protéger les civils. Ils sont devenus des hommes d'affaires".
Pour Xavier Asani, un leader communautaire de Mambasa, il s'agit d'un détournement de la mission de l'armée : "Le travail du militaire c'est de combattre, de défendre l'intégrité territoriale. Mais ces militaires-là se sont détournés de leur mission. La conséquence directe de leurs agissements, c'est l'affaiblissement des opérations militaires. Nous sommes obligés de recourir à des illégaux comme les wazalendo (milices locales, ndlr) parce que ceux qui sont censés nous protéger sont visiblement occupés à autre chose".
L'armée dit agir
L'armée congolaise en Ituri indique être au courant et affirme avoir pris les mesures pour mettre un terme à ces pratiques illégales.
C'est ce qu'explique le lieutenant Jules Ngongo, porte-parole de l'armée : "Depuis que le lieutenant général Luboya Nkashama est gouverneur en Ituri, il a redynamisé la discipline afin que les commandants des grandes unités ne puissent pas envoyer des éléments dans le périmètre des carrés miniers. Beaucoup ont été arrêtés, jugés, condamnés en flagrance et aujourd'hui, ils répondent de leurs actes".
En 2024, alors qu'il était ministre de la Défense, Jean-Pierre Bemba avait demandé au gouverneur militaire de l'Ituri de retirer les militaires des sites miniers. Une instruction qui peine encore à être respectée.