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Honorables, alors on danse ?

27 juillet 2018

Des élections générales sont prévues en RDC au mois de décembre. Pendant la période électorale, les artistes en profitent pour tacler les députés. Textes engagés, rimes sulfuriques, tous les moyens sont bons.

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Demokratische Republik Kongo Parlament Kinshasa
Image : Junior D.Kannah/AFP/Getty Images

"Pendant la campagne ils venaient dans les quartiers, depuis qu'on les a voté, ils ont disparus" (Tshumani, artiste)

Tshumani est un jeune artiste originaire de Likasi, il vit à Lubumbashi dans la province du Katanga. Il est licencié en droit mais il n'exerce pas sa profession. En 2015, il compose "Désolé honorable" un tube qui dénonce les promesses non tenues des députés après les élections de 2011.

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Il chante en swahili sa langue maternelle qu'il utilise pour apostropher les députés qui disparaissent une fois qu'ils sont élus.

« Pendant la campagne, ils venaient dans les quartiers distribuer des t-shirts et du poisson pour demander à ce qu'on les élisent. Depuis qu'on les a élu, ils ont changé de numéro de téléphone, de véhicule, d'adresse, et d'autres ont même changé de femmes,» s’indigne l’artiste avant de poursuivre sur ses motivations « en tant qu'artiste je me suis dit que je dois chanter la réalité parce que je suis un artiste musicien révolutionnaire, je dois révolter les gens. Vous savez que l'histoire se répète quand on ne corrige pas le passé, donc j'ai chanté cette chanson pour que la population congolaise puisse être prudente pour les prochaines élections,» conclut l’artiste.

Autre province, même revendication

Master B Shako est un artiste originaire de Bukavu dans le Sud Kivu. Depuis 2001 il écrit des textes engagés en swahili. En 2004 il sort un premier single constitué de plusieurs tubes comme "Ndakufa juya Congo" "Je vais mourir pour le Congo", "Ongo mutupu" "Pure mensonge" et "Sheriya" "La justice". Récemment Master Shako a fait parler de lui avec le tube "Ma" dans lequel il dénonce lui aussi quelques années plus tard les promesses non tenues des députés.

« Les élections arrivent bientôt et ce sont les mêmes discours que l'on va entendre. Mais pour moi il est question de demander à la population de rester vigilante à ses propres intérêts plutôt qu'aux intérêts de ceux qui viennent nous mentir,» explique l’artiste avant de surenchérir, « je voulais également montrer à la population que la justice n'existe pas en RDC. Nombreuses sont les personnes qui sont arrêtées juste parce qu'ils ne connaissent pas leurs droits. J'ai chanté cette chanson pour que les gens sachent que ce que doit être la justice et que les gens arrêtent d'être emprisonnés parce que jusqu'à présent ce problème persiste »

Mêmes ritournelles

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Les députés ont certes leur part de responsabilité mais pour Alesh un jeune artiste de la scène Hip Hop congolaise les responsabilités sont partagées. Dans sa toute dernière chanson "Biloko ya boye" il pointe tout ce qui ne fonctionne pas dans la société congolaise.

Des problèmes de salubrité à la corruption en passant par l'insécurité grandissante rien n'est laissé au hasard par cet artiste qui brille sur la scène congolaise depuis le début des années 2000.« Pour moi c'est important de rappeler à tout le monde que les responsabilités sont partagées par rapport aux challenges qui sont actuellement vécus dans le pays. La population a sa part de responsabilité mais également ceux qui sont censés ou qui étaient mandatés pour parler au nom de la population, ils parlent au nom de leur propres intérêts au lieu de parler au nom de leur vrai "boss" c'est à dire nous le peuple ordinaire,» souligne Alesh en expliquant « pour moi c'était important de pouvoir le rappeler puisque nous sommes dans une phase déterminante de la vie de ce pays, de la gestion des affaires publiques dans ce pays et pour moi c'est important de rappeler à chacun ses responsabilités mais également ce grand rendez-vous qui arrive en principe dans quelques mois

Une rétrospective chantée du Congo-Zaïre

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Un grand rendez-vous qui est également attendu par un autre artiste : Yekima.

Yekima est slameur. Cela va faire dix ans maintenant qu'il se produit sur plusieurs scènes en RDC et qu'il enregistre des chansons qui sont relayées sur plusieurs scènes en RDC ainsi que les médias internationaux. Il a y quelques mois il a sortit "Les années Zaïre", une rétrospective de ce qu'était la RDC du temps de Mobutu. Sans complaisance aucune il raconte et slame cette époque ce qui fonctionnait ou pas . Pour lui, l'histoire permet d'éclairer le présent en aidant à ne pas tomber dans les mêmes erreurs.

« L'histoire est en train de s'écrire, je note de la part de ces gens là, le besoin prononcé de reconstruire ce pays et des efforts de paix, mais comme on dit parfois, la douleur au petit doigt met en péril tout le corps et tant que ca dure le corps en souffre.  Et ainsi est le sort des pays qui connaissent des guerres incessantes comme le notre. C'est vrai qu'il va y avoir des élections, moi aussi j'attends les élections. Non pas que je place l'avenir du pays à leur actif alors que personne à mon sens n'est le porteur de ce changement profond. On dit que cela pourrait être le début de quelque chose pourvu que l'éveil, la prise de conscience, la vigilance soient nos complices parce que l'histoire nous reviendra toujours tel un boomerang.»

L'histoire a jusque là démontré que le peuple congolais pour sa part reste assoiffé de changement.