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Le Niger à ces VDP, les "Garkouwar Kassa" mais cela inquiète

10 août 2025

Pour les autorités, ces volontaires participeront à des patrouilles nocturnes et des travaux d'utilité publique. Mais, certains Nigériens se montrent inquiets.

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Le général Abdourahamane Tiani le 26 juillet 2024, lors du premier anniversaire du putsch qui l'a porté au pouvoir
Le Niger, comme le Mali et le Burkina Faso voisins, est frappé par des attaques djihadistes depuis des annéesImage : Boureima Hama/AFP

Recruter des civils volontaires, les former et ensuite les envoyer aux côtés des forces de sécurité, c’est l’objectif affiché de l’initiave "Garkouwar Kassa" lancée par le mouvement M62.

Ce regroupement d’organisations favorables aux militaires est né au lendemain du putsch de 2023, au Niger. L' initiative bénéficie du soutien entier des autorités. Le ministre de l'Intérieur, le général Mohamed Toumba, présent à la cérémonie de lancement a expliqué que "les volontaires participeront à des patrouilles nocturnes, à des programmes d'éducation patriotique et de lutte contre la désinformation, ainsi qu'à des travaux d'utilité publique."

"L’objectif n’est pas d’armer des civils"

Issoufou Garba Idrissa, secrétaire Général de l'Union des Étudiants Nigériens qui soutient le M62, précise pour sa part qu'il ne s'agit pas d'aller combattre sur le terrain militaire

"Les civils dont le rôle n’est pas de faire la guerre à la place des militaires doivent à leur façon participer à la sécurisation globale. C’est pour cela que le M62 a développé cette initiative. Cela va contribuer à l’ordre générale en créant les conditions de faire des patrouilles dans les quartiers où la sécurité reste à désirer. La circulation routière et toutes les activités qui participent à la normalisation de la vie en société Cette initiative n’a rien de militaire. Et nous ne sommes pas dans une logique de milice. C’est de faire en sorte que la jeunesse participe à la sécurité des villes. L’objectif n’est pas d’armer des civils pour assurer la sécurité."
  
"Garkouwar Kassa" en haoussa ou "Boucliers de la patrie", serait le fruit d’une des recommandations faites aux militaires par le Conseil consultatif de la refondation (CCR), qui sert d’organe législatif de la transition : créer une force avec un grand maillage communautaire qui permettrait de renforcer la vigilance collective face aux menaces internes et externes.

Réactions au Niger à la création des "Garkouwar Kassa", ces VDP

Risques de dérives 

Cependant des acteurs de la société civile s’inquiètent de la création de cette force et craignent des dérives de la part de ceux qui vont la composer. Parmi eux, Elhadj Baba El Makiyya, expert en securité privée.

"Si la mission de ces VDP se limite à la surveillance, à la dénonciation, à l'alerte, au sécourisme, on peut comprendre cela mais qui dit VDP, cela veut dire qu'ils pourraient être amenés à utiliser des armes et cela n'est pas une bonne chose. Il faut que l'initiateur soit le ministère de l'Intérieur mais pas une structure de la société civile. On ne peut pas prendre des gens comme ça et dire qu'ils sont des VDP. Ils doivent avoir une formation de base sinon ils peuvent se faire justice."

Mahamane Bawa Labo acteur de la société civile dit approuver l'initiative mais insiste notamment sur le volet encadrement. "Il faut que ces jeunes qui seront recrutés soient sousmis à une enquête de moralité, qu'ils soient encadrés par les FDS. Il faut définir leur mission, le délai et les moyens qui seront mis à leur disposition."

Manifestation en soutien aux militaires le 3 aôut 2023, après le putsch
Le recours à des civils pour la sécurité ne rassure pas tous les NigériensImage : AFP

"Nous n'avons pas besoin de supplétifs"

Pour  Abdoul Moumoune Ghousmane, analyste politique, la protection et la sécurité des populations doivent demeurer l’apanage des forces régulières qu’il conviendrait plutôt de renforcer en moyens humains et materiels.

"Que l'Etat mette à la disposition des FDS tous les moyens dont ils ont besoin pour accomplir leur tâche. Nous n'avons pas besoin de supplétifs pour le faire sinon cela va devenir par la suite un sérieux problème de sécurité intérieure."

Malgré l’argument de patriotisme mis en avant par les autorités, plusieurs organisations de la société civile s'inquiètent de la mise en place de cette force qui vient rappeler l’exemple burkinabè des Volontaires pour la défense de la patrie. Les VDP combattent les djihadistes aux côtés de l'armée et sont aussi accusés d'exactions contre certaines communautés.

Le Niger, comme le Mali et le Burkina Faso, est frappé par des attaques djihadistes meurtrières de groupes affiliés à Al-Qaïda et au groupe Etat islamique. Les trois pays ont créé l'Alliance des Etats du Sahel (AES) au sein de laquelle ils coopèrent notamment militairement.
 

Georges Ibrahim Tounkara Journaliste au programme francophone de la Deutsche Welle