Erdogan, Trump et la Colonia Dignidad dans les journaux
27 septembre 2018"Un preneur d'otages en visite d'Etat", c'est le titre provocateur choisi par die tageszeitung pour évoquer l'invitation de Recep Tayyip Erdogan qui, selon le journal, n'est « pas le bienvenu » en Allemagne. En page 3, le quotidien retrace le parcours du président turc "du porteur d'espoir au dictateur".
A cet article, le journal adjoint un encadré sur le bilan chiffré de la répression après le coup d'Etat manqué de 2016 : 36 lois d'exception, 23 mois d'état d'urgence, 129.000 fonctionnaires mis à pied dont seuls 3.700 ont pu réintégrer leurs fonctions, environ 70 incarcérations par jour, 169.000 dossiers d'enquêtes, dix disparitions, 52 suicides, neuf députés incarcérés, 60.000 enseignants limogés, etc.
La taz publie aujourd'hui un numéro spécial avec un facsimilé de son tout premier numéro, il y a quarante ans jour pour jour. L'occasion pour les idéalistes écolos qui ont fondé le journal de revenir sur ses débuts, leurs ambitions d'alors et d'en dresser le bilan quatre décennies plus tard.
La Frankfurter Allgemeine Zeitung revient quant à elle sur la politique de Donald Trump vis-à-vis de l'Iran. La FAZ estime que le président américain et son administration "ont raison de dire que le régime iranien soutient des terroristes, attise des guerres, menace Israël, mène des cyberattaques, emprisonne ses opposants, détient des otages, détourne des sommes d'argent considérables, et est co-responsable à bien des égards de la misère au Moyen-Orient."
Le journal aimerait que les Européens tiennent un langage aussi clair mais l'Union européenne prise en étau se voit contrainte par les erreurs politiques de Donald Trump de se montrer "plus conciliante" que jamais avec Téhéran, écrit la FAZ, pour qu'il ne change pas d'avis sur le nucléaire. Le retrait des Etats-Unis du traité avec l'Iran était donc "une des mesures les plus contreproductives" qui soient du point de vue du journal.
Dans la Süddeutsche Zeitung, on peut lire un article intitulé "Un verdict dérangeant", qui revient sur le refus de la justice allemande de mettre en prison l'ancien médecin de la Colonia Dignidad, une secte fondée au Chili par un ancien nazi. Or ce même médecin, Hartmut Hopp, a déjà été condamné par la justice chilienne pour complicité de viols d'enfants.
"Quand on se penche sur la Colonia Dignidad, écrit la SZ pour planter le décor, on plonge dans un trou noir. Dans cette secte, on assassinait, on torturait, on kidnappait, on violait, on battait, on droguait, on trafiquait des armes, y compris du gaz toxique".
De 1973 aux années 1990, dans l'ombre de Pinochet, l'Allemagne comme le Chili étaient au garde-à-vous ou fermaient les yeux sur ces agissements. Et que fait maintenant la justice allemande pour réparer le mal ? Rien, déplore le journal qui craint que cette décision de ne pas incarcérer le médecin tortionnaire, qui avait fui en Allemagne après avoir été condamné à cinq ans de prison au Chili, ne fasse jurisprudence.
Le quotidien dresse un parallèle avec le traitement réservé aux anciens nazis : le parquet prend tellement son temps que les bourreaux comme les victimes sont soient très vieux soit déjà morts.