Dissolution attendue des partis politiques au Niger
21 février 2025Les travaux des assises nationales au Niger se sont achevés hier [20.2.25] après six jours de travaux. Les cinq commissions mises en place ont rendu leurs conclusions. Parmi les points marquants, citons l'élévation du général Abdouramane Tiani au rang de général de brigade, mais aussi une transition fixée à 60 mois, soit 5 ans renouvelables. Autre résolution : la dissolution des partis politiques. Cette résolution, si elle est validée par le général Tiani, sera inédite au Niger, selon Seidik Abba, journaliste, chercheur associé et président du Centre international d'études et de réflexions sur le Sahel (CIRES).
Seidik Abba: Le Niger en est quand même à son 5eme coup d'État. On reprend les mêmes acteurs, on recommence et ça produit les mêmes effets. Donc, il y a sans doute cette volonté de rupture qui explique cette décision radicale de dissoudre les partis politiques et même l'idée d'envisager, ce qui est totalement inédit, de limiter les partis à deux ou trois. Et je pense que cette idée pourrait ne pas prospérer. Mais la dissolution des partis politiques, à mon avis, si on faisait un référendum aujourd'hui, elle serait majoritaire parce que les gens sont déçus des partis politiques actuels et craignent que si on refait avec les mêmes acteurs et les mêmes structures politiques, on va se retrouver encore dans quelques années à revivre les mêmes expériences.
DW : Selon les assises nationales, les partis politiques doivent donc être dissous. Mais est-ce que les mêmes leaders ne peuvent pas créer d'autres partis ?
Seidik Abba: Je crois que l'hypothèse c'est qu’il y aura une reconfiguration politique. Vous savez aujourd'hui, pour être très concret, si vous dissolvez le PNDS (Parti nigérien pour la démocratie et le socialisme, l'ex-parti au pouvoir) et si vous dites de le reconstituer, je suis sûr que les mêmes acteurs ne seront pas au même endroit. Vous savez, le Niger a vécu, ce qu’on a appelé le "concassage". C'est-à-dire la division des partis. Et ça, ça a été une stratégie de l'ancien pouvoir qui a divisé des partis, qui en a récupéré, qui en a débauché. Et du coup, aujourd'hui, l'idée de dissoudre les partis ce n’est pas pour que les mêmes personnes se retrouvent dans les mêmes partis. Aujourd’hui, beaucoup d'acteurs de la société civile – des gens qui sont très actifs et qui en réalité sont entre la société civile et les partis, vont vouloir eux-mêmes se lancer dans la bataille politique.
L'idée de la refondation, c'est de partir sur de nouvelles bases, y compris avec de nouveaux partis et de nouveaux acteurs.
DW : Est-ce que le Niger n'est pas en train d'imiter ou de suivre ce qui se passe au Bénin voisin ?
Seidik Abba: L'expérience béninoise est une bonne expérience du point de vue de la limitation. Mais elle a été un peu corrompue par la présence très forte de l'argent. Parce que pendant longtemps au Bénin, pour faire la politique, il faut avoir beaucoup d'argent. Et je crois que le Niger a justement cette volonté de faire en sorte que le nombre de partis corresponde au nombre d'offres politiques. Aujourd'hui, il y a 160 partis au Niger. Mais il n'y a pas 160 offres politiques.