La France pressée d’agir au Tchad sur le cas Succès Masra
11 juillet 2025Depuis l'arrestation de l'opposant Succès Masra le 16 mai dernier, plusieurs démarches ont été entreprises par ses avocats français en vue de sa libération, mais sans résultat. Parmi ces actions figurent la saisine du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme, ainsi que celle de la sous-commission des droits de l'homme du Parlement européen, sans oublier l'interpellation du président français Emmanuel Macron.
Pour les avocats et les partisans de Succès Masra, il apparaît que la justice du Tchad éprouve des difficultés en matière d'indépendance et d'impartialité dans ce dossier.
L'activiste des droits humains Enock Mberbé, estime, lui, que la France, ayant joué un rôle clé dans l'accession au pouvoir deMahamat Idriss Déby Itno, est la seule capable de faire entendre raison à ce dernier.
"Ces avocats savent que les autorités tchadiennes ne peuvent écouter que le Maître. Je trouve logique leur démarche. Nous appelons les autorités à revenir à de meilleurs sentiments. En politique il n'y a que des adversaires, il n'y a pas d'ennemis. Aujourd'hui au sein même du parti au pouvoir certains appellent les autorités à de meilleurs sentiments. Ça ne sert à rien de continuer à garder l'ancien Premier ministre Succès Masra."
Silence de Paris ?
Mais pour l’analyste politique Docteur Yamingué Betinbaye, le silence de Paris sur ce dossier peut s'expliquer par la détérioration récente des relations entre la France et le Tchad.
"Cette interpellation s'est faite sans tenir compte des contextes actuels des relations diplomatiques entre le Tchad et la France. C'est ce qui explique un peu cette sorte de réticence de la France et du Président Macron à donner une suite favorable à cette sollicitation des avocats de Succès Masra."
"Mais en même temps, poursuit l’analyste politique Docteur Yamingué Betinbaye, cette démarche des avocats de Succès Masra peut être comprise parce qu'aujourd'hui personne n'est dupe.Le dossier Succès Masra n'est pas un dossier judiciaire, c'est un dossier politique. Donc tous les efforts pour faire bouger les lignes seraient les bienvenus et je pense que c'est à ce titre que les avocats de Succès Masra ont entrepris cette démarche".
Bruno Fuchs, député français proche du pouvoir d’Emmanuel Macron estime Paris n'a pas croisé les bras sur ce dossier.
"Paris publiquement est silencieuse, Paris ne fait pas de pression. Je pense qu’on a demandé certainement des informations sur la situation de monsieur Masra. Je ne pense pas que Paris, en tout cas le gouvernement, ait fait une demande spécifique."
Le député du Modem rappelle que "la France est respectueuse du droit international, respectueuse du droit en général et du droit dans lequel chacun des pays s’est engagé".
Le 7 juillet dernier, la présidente de la commission des Affaires étrangères du Sénat américain, Jeanne Shaheen, avait également appelé à la libération de Succès Masra, soulignant que la situation était désormais suivie de près par les autorités américaines. Nous avons tenté, en vain, d'obtenir l’avis du ministre porte-parole du gouvernement tchadien, Gassim Chérif, sur ce sujet.