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SciencesAfrique

"L'Afrique s'intéresse à l'énergie nucléaire"

2 juillet 2025

Interview avec Delwende Nabayaogo, expert en sûreté et sécurité nucléaire. Il revient sur l'intérêt des Etats africains pour le nucléaire civil, comme source d'énergie.

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Notre invité de ce matin est le Burkinabè Delwende Nabayaogo, expert en sûreté et sécurité nucléaire.

A la faveur du conflit entre Israël et l’Iran, avec le bombardement des installations iraniennes, celui-ci revient sur l'intérêt de l'Afrique pour l'énergie nucléaire. 
L’Afrique du Sud est le seul pays d’Afrique à s’être doté de l’arme nucléaire et le seul au monde à avoir accepté de démanteler son arsenal de six ogives nucléaires, au début des années 1990.

Pour ce qui concerne le nucléaire civil, l’Afrique du Sud possède deux réacteurs, tandis que d’autres pays du continent souhaitent se doter de centrales nucléaires. C’est le cas de l’Egypte, du Maroc, du Kenya, ou encore du Mali et du Burkina Faso

Ces deux derniers pays ont signé des accords allant dans ce sens avec la Russie.

Analyse : le projet nucléaire du Mali est-il une chimère ?

Entretien avec Delwende Nabayaogo, expert en sûreté et sécurité nucléaire

 

DW : Est-ce que le nucléaire est une question qui intéresse beaucoup l'Afrique, aujourd'hui ?

 Oui, la question du nucléaire intéresse l'Afrique à deux niveaux. D'abord parce que beaucoup de pays africains sont intéressés à aller vers l'énergie nucléaire, pour le besoin de développement socio-économique ; avec tous les besoins énergétiques que nos pays connaissent, il faut trouver des sources qui puissent permettre des produits de grande quantité d'énergie. Et l'énergie nucléaire reste une alternative réelle à cela.

Le deuxième niveau d'intérêt pour le nucléaire, c’est qu’il y a d'autres applications qui ne sont pas à grande échelle mais à petite échelle, dans le domaine de la médecine comme la radiothérapie, la médecine nucléaire, d'autres domaines comme la recherche, l'agriculture, et cetera, où on utilise des petites applications, des matières ou sources radioactives pour toujours contribuer au développement socio-économique des pays.

Un autre aspect que je peux ajouter, c'est justement, au regard de l'actualité qui peut être préoccupante pour tout pays africain, parce que quoi qu'on en dise, même si on n'a pas d’intérêts dans le sens d'applications militaires, on ne souhaite pas non plus être inquiétés par un autre pays, peu importe la distance qui nous en sépare, qui puisse en disposer.

 

DW : Ce qui intéresse donc l'Afrique aujourd'hui, c'est le nucléaire civil qui est différent du nucléaire militaire ?

Exactement, l'Afrique s'intéresse au nucléaire civil, donc l'application pacifique de l'énergie nucléaire et non pas les le nucléaire militaire.

 

DW : Est-ce que l'Afrique aujourd'hui dispose de tout ce qu'il faut pour aller vers le nucléaire civil ? On dit que c'est une énergie qui a qui est quand même compliquée, il faut une certaine maîtrise. Est-ce que l'Afrique a, aujourd'hui, cette maîtrise-là ?

Il y a des pays africains qui sont avancés sur la question en termes de technologie nucléaire, qui ont des réacteurs de recherche déjà qui ont fait des expériences et qui ont formé les personnes qui disposent de la ressource humaine et de la connaissance scientifique pour aller donc au développement de l'énergie nucléaire.

il y a l'Afrique du Sud qui en dispose. Ces dernières années, des pays aussi s'y lancent - Kenya, Niger, Burkina etc. - qui sont intéressés par l'énergie nucléaire, mais qui ont du chemin à faire pour former, développer la ressource humaine. Et puis acquérir les connaissances nécessaires pour y arriver.

DW : C'est une énergie risquée.

Il y a des dangers liés à son utilisation si elle n'est pas maîtrisée.

Vous avez vu avec les accidents qui sont survenus dans certains pays au Japon, Fukushima, on se rappelle encore de Tchernobyl et lorsque de tels accidents arrivent, il y a des conséquences très néfastes pour les personnes, pour l'environnement.

Donc il faut avoir une bonne maîtrise et être rigoureux dans son application.

Ce sont des applications qui peuvent être toujours détournées à des fins malveillantes, donc l'aspect sécurité de cette technologie compte beaucoup pour éviter que des personnes malveillantes donc ne puissent s'en approprier.

 

DW : Est-ce que l'Afrique ne peut pas se passer de cette énergie nucléaire aujourd'hui, au profit d'autres alternatives ?

Il y a des alternatives comme le solaire que beaucoup de pays essayent de développer. Mais au regard des besoins énergétiques, ce n'est pas évident que nos pays puissent compenser vraiment le Ce besoin là avec uniquement les sources fossiles, l'énergie thermique, l'énergie solaire, l'énergie thermique étant déjà très polluante, l'énergie nucléaire est reconnue comme une énergie propre.

Malgré les risques qui y sont liés, l'Afrique peut toujours continuer dans l'option donc du solaire où l'éolien ou mais ce n'est pas évident qu'on pourrait se passer véritablement du nucléaire si le rythme du développement continue avec le les industries qui se construisent, les infrastructures qui augmentent avec un besoin fort en énergie.

 

DW : Quel regard est-ce que vous jetez aujourd'hui sur le débat relatif au nucléaire iranien ?

La communauté internationale, à travers les instances spécifiques, encourage l'utilisation pacifique de l'énergie nucléaire qui ne demande pas de grande quantité d'uranium enrichi :  des enrichissements de 20% suffisent pour produire de l'énergie nucléaire.

Lorsque on enrichit l'uranium au-delà, ça suscite des inquiétudes sur les intentions réelles, mais c'est des questions vraiment politiques en tout cas. Il faut encourager l'utilisation pacifique qui y est très bénéfique pour tous les pays.