Le Burkina Faso criminalise l'homosexualité
2 septembre 2025Au Burkina Faso, le Parlement de transition a voté une nouvelle loi qui criminalise les pratiques homosexuelles, avec des peines allant jusqu'à cinq ans de prison.
Par cette loi, les militaires au pouvoir s'en prennent à des libertés qu'ils considèrent importées des pays occidentaux. Mais les organisations de défense des droits humains redoutent un durcissement de la stigmatisation des minorités sexuelles.
Ce que contient la nouvelle loi
La nouvelle loi durcit la législation en matière de mœurs.
Le texte adopté criminalise désormais explicitement les pratiques homosexuelles, avec des peines pouvant aller jusqu'à cinq ans de prison.
C'est une première dans l'histoire juridique burkinabè.
Le projet de loi a été adopté à l'unanimité par les 71 membres de l'assemblée législative de transition, non élue, qui fait office de Parlement depuis la prise de pouvoir par les militaires, il y a près de trois ans.
Cette décision intervient dans un contexte politique particulier, où le régime burkinabè affiche de plus en plus sa défiance vis-à-vis de l'Occident. L'adoption de cette loi apparaît ainsi comme un signal politique s'inscrivant dans une tendance observée dans plusieurs pays africains, où les autorités rejettent ce qu'elles considèrent comme des valeurs étrangères.
La pénalisation de l'homosexualité s'inscrit dans une loi plus large réformant le Code des personnes et des familles.
Ce nouveau Code modifie également les conditions d'octroi de la nationalité burkinabè via le mariage, imposant désormais aux étrangers un délai de cinq à sept ans avant de pouvoir l'obtenir.
Des craintes pour les droits humains
Les mariages religieux et coutumiers sont également désormais reconnus légalement.
Ce nouveau code doit être promulgué par le capitaine Traoré, le chef du pouvoir militaire, et sera "vulgarisé à travers une campagne de sensibilisation", selon le garde des Sceaux.
Pour les organisations de défense des droits humains, cette législation ouvre la voie à davantage de stigmatisation et de persécutions contre les minorités sexuelles.
Mais du côté des autorités militaires, on insiste sur la nécessité de préserver ce qu'ils désignent comme les valeurs sociales et culturelles nationales.
Avec ce texte, le Burkina Faso rejoint la liste croissante des pays africains qui répriment pénalement l'homosexualité, au risque d'un nouvel isolement sur la scène internationale.
D'ores et déjà, tout en saluant la décision de fixer l'âge de mariage des garçons et des filles à 18 ans, Amnesty international a exprimé ses préoccupations à la suite de l'adoption de la loi criminalisant les relations entre personnes adultes de même sexe.
Pour sa part, Pan Africa Ilga, un réseau africain d’organisations de défense des droits des personnes LGBTQ+, parle d’un recul des droits humains. Anthony Oluoch, directeur de programmes de Pan Africa Ilga, déclare à la DW : "Cette criminalisation, bien qu’il s’agisse d’un changement de politique, concerne vraiment la vie des gens. Nous avons assisté à une augmentation des criminalisations à travers le continent, dans les lois qui rendent la vie difficile pour les gens".
Les militants LGBTQIA + espèrent simplement "une vie heureuse et d’aimer qui que ce soit et d’être qui on est".
Or, plusieurs pays ont durci leur législation. "Non seulement au Burkina Faso, mais aussi au Mali récemment, nous avons vu ces lois être adoptées. Et ces modèles se produisent partout ailleurs sur le continent. Et à une époque où les mouvements africains se renforcent, ils deviennent plus visibles, ils deviennent plus connectés, nous pouvons nous inquiéter", souligne Anthony Oluoch.
Il conclut : "Ces criminalisations et surtout celle du Burkina Faso, ne vont pas seulement affecter les gays ou les lesbiennes, les bisexuels…., ça pousse les communautés à la clandestinité. Leur adoption rend plus difficile pour les gens de vivre une vie plus pleine. Cela rend plus difficile pour le gouvernement même d’offrir des programmes de santé publique et cela ne fait que rendre les gens plus vulnerables."