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Présidentielle au Cameroun : les médias en spectateurs

12 septembre 2025

Le CNC interdit les débats politiques dans les médias au Cameroun dans le cadre de la campagne pour la présidentielle du 12 octobre

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Une rue animée de Yaoundé.
La présidentielle au Cameroun se déroule le 12 octobre.Image : Henri Fotso/DW

Le Conseil National de la Communication (CNC) interdit les débats politiques dans les médias au Cameroun, dans le cadre de la campagne pour la présidentielle du 12 octobre.

Dans les rédactions, c'est la déception totale et l'inquiétude. Au Syndicat national des journalistes du Cameroun (SNJC), les spécialistes estiment qu'il s'agit d'une mesure répressive et inacceptable. Des politiques, quant à eux, parlent d'un stratagème du régime de Paul Biya pour esquiver la contradiction et les questionnements sur son bilan de 43 ans de pouvoir.

Le glas a sonné pour trois émissions politiques de Radio Tiemeni Siantou (RTS) basée à Yaoundé, depuis le 31 juillet dernier, date de la signature d'une lettre par le président du Conseil National de la communication (CNC) demandant  la suspension, à compter du 27 septembre, des émissions de débats politiques.

La décision concerne RTS mais aussi les quelques 300 autres stations de radio et une cinquantaine de chaînes de télévision de droit camerounais.

"Nous prenons acte du courrier et nous sommes obligés de suspendre nos émissions, explique le chef de chaîne de Radio Siantou, Eric Boniface. Ça nous peine parce que nous avons au moins trois émissions à caractère politique. Ces trois programmes iront en congé, tous les présentateurs ont été déjà informés. Nous allons à la place mettre sur pied une émission dédiée à la campagne électorale et même à la présidentielle que nous avons d'ailleurs baptisée Cameroun 2025".

Une censure récurrente

Ce n'est pas la première fois que la censure frappe les médias au Cameroun. Des hommes et femmes de média affirment avoir souvent connu cette censure depuis la présidentielle de 2004. A leur déception s'ajoute la frustration des politiciens qui avaient déjà bien fourbi leurs cartouches médiatiques pour cette période. Pour l'opposition radicale il s'agit d'un stratagème du RDPC de Paul Biya pour esquiver les questionnements sur son bilan de 43 ans de pouvoir.

Bedimo Kouo, Secrétaire national à la communication du Mandiem, estime que "c'est un avis à ceux qui récemment ont sorti une déclaration du genre « l'opposition camerounaise est la plus bête. » Nous les invitons à venir voir dans quelles conditions travaille l'opposition au Cameroun, des conditions de restriction des libertés, de pression, d'intimidation. Le Mandiem est bien placé pour en parler. Le Mandiem qui vient de subir tout un mois de surveillance militaire autour de sa permanence".

Paul Biya
Certains estiment que l'interdiction des débats est un stratégie du camp de Paul Biya pour éviter au président sortant d'être questionné sur son bilan.Image : Charles Platiau/REUTERS

Au Syndicat national des journalistes du Cameroun, la mesure restrictive contre les programmes politiques en période électorale est également mal perçue et mal supportée. Car, souligne-t-on, cette mesure ne s'inspire ni de la Loi portant Code électoral (2012) ni de la Loi régissant la communication sociale (1990) dans le pays. Elle s'appuierait seulement sur deux actes du gouvernement (un décret du premier ministre et un arrêté du ministre de la communication) datant d'avant la création d'Elecam en 2006, seul organe chargé du processus électoral au Cameroun.

RSF dénonse une atteinte à la liberté de presse

Hilaire Hamekoue, secrétaire général du SNJC, pense "que le président de la régulation va rester au niveau de l'annonce et qu'il ne va pas rentrer dans les actes, parce que ça serait une décision inacceptable et lourde de conséquence, parce que le président de la régulation s'érige là en rédacteur en chef de tous les médias, ce qui n'est pas acceptable. Le CNC mis en place unilatéralement par le gouvernement semble être plutôt répressif que de faire  la régulation".

Contacté par la Deutsche Welle, le président du CNC n'a pas voulu s'exprimer. Reporter Sans Frontières (RSF) dénonce les atteintes à la liberté de la presse qui se multiplient au Cameroun. RSF appelle les autorités à y mettre fin et à s'engager à ne pas entraver le libre exercice du journalisme, particulièrement important dans les périodes électorales. Le Haut-Commissaire de l'Onu aux droits de l'Homme, Volker Türk, a également fait part de ses craintes quant à la liberté d'expression à l'approche de la présidentielle du 12 octobre au Cameroun.

Vue arienne sur un carrefour de Douala la nuit
Henri Fotso Correspondant au Cameroun pour le programme francophone de la Deutsche Welledwfrancais