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EconomieAfrique

Burundi : la jeunesse s’émancipe par l’entrepreneuriat

Rodrigue Guézodjè
10 juillet 2025

Face au chômage et à la précarité, de jeunes Burundais misent sur l’auto-emploi, guidés par l’innovation, la formation et la résilience. Alors que l’Afrique connaît un élan entrepreneurial, la valorisation des innovations reste un défi. L’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) propose des outils simples pour aider les PME à protéger leurs actifs à l’international.

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À la rencontre d’une jeunesse burundaise pleine de dynamisme, de créativité et de détermination. Face à un chômage élevé et à une précarité persistante, de nombreux jeunes entrepreneurs et étudiants font le choix audacieux de l’auto-emploi. Leur arme principale : l’innovation et la résilience.

Transformer les déchets en espoir

« Notre projet consiste à recycler les déchets plastiques en les transformant en très beaux et jolis objets de décors… », explique Ariane, 22 ans, étudiante en génie rural.
Dans son atelier artisanal, elle donne une seconde vie aux plastiques abandonnés. Un geste pour l’environnement, mais surtout un engagement entrepreneurial, mûri à force de recherches sur la durabilité des matériaux.

Malgré des outils rudimentaires et une rude concurrence – notamment des objets importés fabriqués en série – elle garde la tête haute.
« Il y a des déchets plastiques en grandes masses non biodégradables… », confie-t-elle. Pour elle, chaque objet local vendu est un acte de résistance économique.

Une jeunesse en quête de sens

Le "Made in Burundi" peine encore à séduire, tant les habitudes de consommation valorisent l’importé. Mais pour de nombreux jeunes, cette injustice est devenue une source de motivation.

Au cœur de séances de coaching entrepreneurial, d’autres jeunes affûtent leurs compétences : leadership, communication, stratégie… tout est passé en revue pour leur permettre de bâtir des projets solides.

Eric, Joëlle et Claver en sont convaincus : « Même si tu n’es pas entrepreneur, tu auras besoin de savoir comment te présenter, comment défendre ton idée… ».  Ils apprennent aussi à s’aligner sur des besoins sociaux réels, à identifier les causes des problèmes pour mieux y répondre.

"Le client est roi" : Claudette l’a compris

Issue d’une filière finance-comptabilité, Claudette s’est lancée dans la location et la vente d’accessoires de décoration pour événements. Venue renforcer ses acquis, elle retient une leçon essentielle : « Toutes les idées ne sont pas entrepreneuriales… Le client est roi. Il faut comprendre ses besoins réels et apporter des solutions claires et concrètes. »  Son témoignage traduit une prise de conscience essentielle : entreprendre ne se limite pas à avoir une bonne idée, mais exige méthode, écoute et adaptabilité.

Des freins persistants mais contournables

Malgré cette effervescence, les jeunes entrepreneurs doivent composer avec un écosystème encore fragile : difficultés d’accès au financement, cadre juridique contraignant, manque d’infrastructures, déficit de compétences spécialisées… Mais pour Berthon Manariyo, coach en entrepreneuriat et innovation, « ces défis ne sont pas insurmontables ». Il insiste sur l’importance de l’accompagnement tout au long du processus : « Il y a beaucoup d’idées, mais aussi beaucoup de mortalité entrepreneuriale. Ce genre de formations, c’est pour la communauté autant que pour l’individu. »

Investir sur l’humain, levier du développement

Le sujet met en lumière un consensus : la réussite entrepreneuriale repose moins sur les moyens que sur l’humain. Vision, motivation, résilience, réseau – voilà les carburants d’une nouvelle génération décidée à ne plus attendre l’emploi, mais à le créer. Au Burundi, l’espoir porte un nom : l’initiative. Et à travers des projets parfois modestes, cette jeunesse démontre que l’autonomisation est possible – pour peu qu’on lui en donne les moyens.

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Trois voies pour protéger ses actifs à l’international

Dans un monde globalisé où la compétition est féroce, protéger ses idées, marques ou inventions devient une étape cruciale pour toute entreprise souhaitant se développer au-delà de ses frontières. « Pour aller à l'international, il y a trois voies principales : la voie nationale, la voie régionale et la voie internationale », explique Yves Ngoubeyou.

La voie nationale reste limitée à un seul pays. La voie régionale, elle, permet d’agir dans plusieurs États, mais oblige à composer avec des législations, procédures et monnaies différentes. C’est pourquoi l’OMPI propose des systèmes d’enregistrement international, qui offrent une procédure unique pour enregistrer des droits de propriété intellectuelle dans plusieurs pays. « Ces systèmes sont rapides, simples à utiliser, et surtout plus abordables financièrement, notamment pour les PME des pays les moins avancés qui bénéficient d’une réduction de 90 % sur les taxes de base. »

Sensibiliser pour créer le réflexe PI chez les entrepreneurs

Pour permettre aux PME africaines de tirer pleinement parti de ces outils, l’OMPI mise sur la sensibilisation. « Il est essentiel que les entrepreneurs comprennent ce qu’est la propriété intellectuelle et identifient leurs actifs pour les protéger au niveau national, régional ou international », poursuit l’expert.

L’objectif est de faire de la gestion des droits de propriété industrielle une pratique systématique, et non une action de dernier recours. Cela suppose d’éduquer, de former et de soutenir les entrepreneurs dès les premières étapes de leurs projets.

 Les erreurs à éviter : oublier de protéger l’essentiel

Trop d’entreprises découvrent trop tard l’importance de la propriété intellectuelle. « Beaucoup d’entrepreneurs se lancent sans avoir conscience de la valeur de leurs actifs immatériels. C’est lorsqu’un problème survient – contrefaçon, perte de parts de marché, imitation – qu’ils réalisent qu’ils auraient dû anticiper. » 

Pour y remédier, l’OMPI a mis en place : des programmes de formation via son Académie mondiale, des séances de coaching et de mentorat, des outils pour aider les entreprises à identifier, protéger et valoriser leurs actifs. Un packaging bien pensé, une marque déposée, un design protégé : autant d’éléments qui peuvent booster l’attractivité commerciale d’un produit local.

L’innovation comme moteur du développement

En reliant les réalités locales – comme les parcours de jeunes entrepreneurs burundais – aux outils internationaux de valorisation, le lien est clair : l’avenir économique de l’Afrique passe aussi par l’intelligence de ses jeunes entreprises. « Nous vivons dans un monde globalisé, et toutes les entreprises ont vocation à conquérir des marchés extérieurs. La propriété intellectuelle est un tremplin pour y parvenir. »

Le combat pour l’autonomisation économique ne s’arrête pas à l’étape de la création d’entreprise. Il s’agit désormais pour les PME africaines de protéger, structurer et valoriser leur potentiel d’innovation.

Grâce aux mécanismes de l’OMPI, elles disposent d’un arsenal stratégique pour affronter les marchés internationaux. Encore faut-il en connaître l’existence – et saisir l’opportunité.

 

 

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Image : Ute Grabowsky/photothek.net/picture alliance

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