Bruxelles suit de près l'élection en Allemagne
18 février 2025"L'Europe n'est pas forte sans une Allemagne forte", affirmait la présidente du Parlement européen, Roberta Metsola, après l'implosion de la coalition gouvernementale en Allemagne en novembre dernier.
Mais les déclarations s'arrêtent là, respectant la tradition que les institutions de l'Union européenne ne commentent pas les élections dans les États membres.
Un diplomate de l'UE a toutefois résumé l'état d'esprit à Bruxelles, celui de retrouver de la prévisibilité à l'issue du scrutin en Allemagne, avec un nouveau gouvernement stable et qui suit un cap, affichant une position claire sur les projets législatifs européens.
L'UE espère plus de clarté
La coalition émanant des législatives de 2021 était composée des sociaux-démocrates du SPD, des Verts et des libéraux du FDP, ces derniers ayant défendu des idées régulièrement opposées au deux autres partis.
Par exemple, l'accord européen sur les voitures climatiquement neutres à partir de 2035 a été reporté de plusieurs semaines en raison de désaccords internes au sein du gouvernement allemand.
Il existe aussi ce que l'on appelle dans le jargon bruxellois, le "vote allemand". Lorsque la coalition à Berlin ne parvient pas à s'accorder sur une réforme européenne, l'Allemagne s'abstient lors du vote.
Pourtant, lorsque l'UE adopte une loi, elle doit généralement être approuvée par au moins 15 États membres, représentant 65 % de la population. L'Allemagne représente à elle seule 18,5 % de la population, qui ne sont pas comptabilisé en cas d'abstention.
Le couple franco-allemand
Ces dernières années ont montré à quel point l'UE est bloquée lorsque l'Allemagne n'est pas dans un rôle de leadership, estime Fabian Zuleeg, directeur de l'European Policy Center basé à Bruxelles. "Nous avons vu de l'instabilité en Allemagne. Nous avons vu comment des décisions ne peuvent tout simplement plus être prises. À Bruxelles, la crainte est très forte que rien ne change après les élections", explique l'économiste.
La coopération franco-allemande est considérée comme le moteur des projets européens. Son bon fonctionnement dépend également de la façon dont les dirigeants des deux pays s'entendent. Et la relation entre le président Emmanuel Macron et le chancelier Olaf Scholz n'est "pas particulièrement facile", note la politologue Sophie Pornschlegel, directrice adjointe de l'Institut Jacques Delors à Bruxelles.
Plus largement, le couple franco-allemand a été marqué ces dernières années par une faible volonté de compromis. Et si la coalition allemande a été marquée par des dissensions internes, la France est dans une crise politique profonde depuis les dernières élections européennes et la poussée de l'extrême-droite.
Budget européen et défense
Quoi qu'il en soit, le futur gouvernement allemand sera rapidement confronté à des dossiers prioritaires pour Bruxelles. D'une part, la Commission veut proposer un nouveau cadre financier pluriannuel de 2028 à 2034 d'ici l'été prochain et l'Allemagne est le premier contributeur au budget de l'UE.
Ce budget devra notamment éponger des dettes contractées pendant la pandémie de coronavirus, de l'argent qui pourrait manquer par la suite à la compétitivité de l'Allemagne, qui pratique un frein à l'endettement.
Enfin, le financement des dépenses militaires est un autre dossier brûlant, d'autant plus depuis la volonté de désengagement sur le Vieux continent affiché par la nouvelle administration américaine.
Dans ce contexte, certains pays comme la Pologne et les Etats baltes sont favorables à un endettement européen commun, ce que refuse catégoriquement Berlin.
La Commission européenne estime que 500 milliards d'euros d'investissements dans la défense seront nécessaires au cours des dix prochaines années.